Contemplation (extrait)

co-émergence de Dakas et Dakinis

Nigunapa

Le mahasiddha Nigounapa

Transmission

Pour s’appliquer à la contemplation tantrique, il est nécessaire de connaître le symbolisme des aspects de la visualisation. Lors de l’initiation (sct. Abhikentsa, tib. Ouang Kour), le Lama introduit le disciple à la Vue Pure du mandala. Lors du commentaire (tib. Tri), le Lama introduit l'élève au symbolisme pur. La transmission par l’insufflance ou « Loung » donne autorité à l'élève au seul fait de réciter les termes de la sadhana même si nous n’avions aucune capacité à visualiser et à comprendre ce qui se dit. Initiation, Commentaire et Insufflance sont les trois transmissions spécifique du Tantrayana.

Contemplation

Durant la récitation du mantra, la connaissance du symbolisme doit participer de la contemplation. Par la récitation concentrée du mantra, le discours mental se lasse de lui-même, puis en y joignant l’effort de l’évocation de l’image, s’établit l’espace de contemplation. À ce moment-là, sans aucun énoncé discursif, il faut faire participer la connaissance du symbolisme. Cela relève à la fois du contrôle et de la détente. Demeurer dans cette sphère imaginale, unifiant image et signifiance, est le sens même de la contemplation tantrique.
Les souffles sont images limpides dont la mobilité non-obstruée renvoie au domaine des Dakinis (tib. Kandro). La signifiance de l’imaginal renvoie aux messagers les Dakas qui donnent trajet (sct. Nadi) aux souffles. Les Dakinis sont réunies, captées, captivées (tib. Ouang Du) en assimilant l’image à la signifiance. Cette assimilation est la fonction de la contemplation tantrique et elle s’opère par la maîtrise du tantrika. Image et signifiance co-émergent de tout temps, mais par le fait de l’ignorance et de la saisie, leur co-émergence innée n’est pas reconnue et le mental est troublé et contaminé des autres voiles et des quatre souillures. Le mental est alors sous l’effet de projections, fantasmes, imaginations qui n’entraînent finalement que Doukkha. Leur co-émergence innée n’est rien d’autre que la co-émergence de Clarté Vacuité, Aspect et Vide, Daka et Dakini.

Dans l’espace de contemplation et d’inspiration que la Dakini propose, le Daka introduit une portée significative de cet espace. Pour le (la) yogacharya contemplatif c’est le moment où il fait intervenir, sans discours, la portée de la connaissance du symbolisme pur. En la co-émergence des deux — la contemplation des aspects et de la symbolique — s’opère une « métaphore révélatrice  ». La métaphore contemplative opère un transport (gr. Phore) au-delà (gr. Méta) de nos réductions et réifications cognitives.
La métaphore est un transfuge qui permet d’accéder au paradoxe cognitif de la réalité indicible, c’est-à-dire « savoir sans discours » : À cet instant s’établit la co-émergence de l’apparence-vide, connaissance-vide et félicité-vide. La métaphore révélatrice dans la contemplation signe la consilience.

Celui qui contrôle cette assimilation peut reconnaître la co-émergence innée. Réalisant l’illusion de la saisie, les cinq éléments et agrégats fonctionnent naturellement dans leur aptitude innée (cf. Les cinq processus). Le (la) yogacharya se libère des projections et voit le jeu de l’illusion. La compassion qui en découle sera capable de moyens habiles parce que l’illusion est la base de l’effiScience (sct. Upaya). C’est pourquoi il faut se concentrer avec un effort approprié et sans relâche (cf. principe de la visualisation).

Libre de ma fixion, les cinq éléments sont la sphère des Dakinis primordiales. Cette sphère du Dharma Dathou est toute évidanse.
Libre de ma fixion, les cinq agrégats sont l’activité des Dakas primordiaux. Cette activité est la signifiance de l’infinitude du phénomène (tib. Tcheu Ying) .
Libre de ma fixion, les émotions se révèlent l’intelligence en jouissance de cet espace (tib. Kha Tcheu) où s’unissent Dakas et Dakinis.

Néologismes et définitions

1- Le néologisme « fixion » évoque deux fonctionnements en un mot.
a) Le fait de la saisie qui fixe un moment du continuum des apparences et de l’esprit en leur imputant une réalité propre.
b) Le fait que cette réalité est fictive et que le devenir dans lequel est emporté l’esprit est une fiction.

2- Le néologisme « évidanse » combine le terme « évidence » avec le terme « danse ». Ce n’est pas particulièrement original, mais l’objectif d’un néologisme est de faciliter l’approche d’une expérience. La dakini renvoie à la notion d’espace et déplacement, l’un et l’autre étant co-émergents. L’espace rend possible le déplacement et le déplacement fait preuve évidente de l’espace.

3- Le terme « signifiance » n’est pas un néologisme.
Pour le linguiste, la signifiance est l'émergence du sens chez le récepteur. Ici, j’utilise ce mot en y ajoutant la vue sahaja, la co-émergence de la signification et de la vacuité de sens en soi. Il y a bien l’émergence d’un sens chez le récepteur, cependant, n'ayant de sens préexistant, le récepteur en comprend ce qu’il veut ou ce qu’il peut. Finalement c’est par le fait d’émergence qu’il y a signifiance, le sens n’étant pas pour autant fini ou défini d’avance.
Pendant l’enstase contemplative et de la connaissance du symbole, la signifiance participe de l’infinitude imaginale des phénomènes. Le contrôle, associé au Daka, ne consiste pas à tout savoir des phénomènes, mais à rester en cette participation. C’est en cet instant que la signifiance aura une répercussion indélébile sur les souffles de sagesses pour toutes les vies suivantes.

L’omniscience (tib. Kun Kyen) n’est pas le pouvoir de connaître tous les phénomènes, mais de connaître leur universalité de nature clarté-vide.