Interdépendance et divination :

 

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Avec l'apprentissage d'un jeu de divination original de Lama Shérab sur la base de l'enseignement du Bouddha sur les douze facteurs interdépendants. Lama Shérab exposera en détail cet enseignement et expliquera son jeu de divination permettant à chacun d'interpréter, pour soi-même ou une autre personne, la situation du chemin spirituel avec les acquis et les obstacles.

La genèse de l'existence conditionnée (samsara) a été enseigné par le Bouddha Sakyamuni d'une façon extensive en douze facteurs interdépendants commençant par l'ignorance et finissant par la mort.

       


Sur la voie qui même à l’Éveil , il est nécessaire d'effectuer l'accumulation de sagesse qui consiste, ici, en la réflexion et la méditation sur les douze facteurs interdépendants. Le fruit de cette méditation est la compréhension et la réalisation de l'absence de réalité intrinsèque en les phénomènes et l'esprit. Une réflexion ferme sur ce thème est indispensable pour bénéficier d'une aisance dans la méditation.

Littéralement, le tibétain “Tèn ching Drèl Djoung” veut dire ; “ayant une base, apparaît une connexion”. C'est le principe de la production interdépendante. Si ignorance il y a, il y a impacte sur le facteur mental suivant et ainsi de suite.

Traditionnellement, les douze liens interdépendants présentent la séquence à l'échelle d'une existence humaine. Ici, Lama Shérab Namdreul propose de concevoir ces douze facteurs mentaux sur un mode phénoménal modulant l'esprit en quelque "bardo" et quelqu'existence que ce soit.

Selon la Vue sahaja, ignorance (sct. avidya, tib. ma-rik-pa) et gnose (sct. vidya, tib. rik-pa) sont co-émergent parce qu'elles ne sont pas quelque chose en soi et que les deux participent au seul fait de "co-naître". Ainsi, libérer l'esprit du voile même de l'ignorance peut se faire en chaque facteur mental qui se présente de la même manière qu'il est possible de dissiper un malentendu en tout instant.

Pour s'engager dans la voie de cette libération, il faut commencer par envisager que les phénomènes et l'esprit soient ignorés pour ce qu'ils sont naturellement, puis comprendre les conditionnements concomitants sur tout le processus cognitif et diagnostiquer les inconvénients et les perturbations que cela provoque pour y remédier par l'analyse et les dissiper en la contemplation directe.

1) Ignorance fondamentale (avidya)
L'ignorance fondamentale désigne l'état général dans lequel se trouve le mental du fait qu'il ne reconnaît pas la nature primordiale des phénomènes et de l'esprit. Ce fait que l'on nomme "ignorance" se passe depuis des temps sans commencement, à chaque instant par inadvertance où la conscience se détourne de la nature primordiale du phénomène dont l'absence de réalité est appréhendée comme annihilation. En ne reconnaissant pas la nature du phénomène tel quel (sct. dharmata), l'esprit ne peut être également reconnue dans sa nature telle quelle.

Sous l'impulsion de l'ignorance fondamentale, les onze facteurs mentaux suivants vont acter et valider un enchaînement "karmique altéré" (tib. lés) d'illusions. Cette contamination du karma se révèle par des symptômes divers que l'on résume par un mal-être existenciel (sct. doukkha) et tourments. En éradiquant l'ignorance fondamentale, s'élève spontanément la gnose primordiale faisant en sorte que les onze facteurs suivants ne sont plus souillés d'illusions et seront vecteurs de bien-être (sct. soukkha) en laissant se déployer le karma naturel non-altéré (tib. trin-lés) de la bienfaisance (sct. sou-gata) de l'esprit.

2) Agrégat Ré-activité mentale (samskara)

L'ignorance fondamentale et ses effets concomitant (sct. samprayukta, tib. ts'oung dèn) vont conditionner d'illusions toute l'activité cognitive et conceptive du mandala "esprit/phénomène", le "centre administratif" de l'activité co-émergente (sct. sahaja, tib lhèn kyé) de penser/pensé (tib. sèm/sèm djoung) que l'on nomme "samskara". Ce cœur "administratif" qui organise toute l'activité karmique se compose des "cinq similarités", des "cinq facteurs omnifonctionnels" de l'esprit ainsi que "les cinq facteurs déterminant l'objet". À partir de là, suviennent, selon les circonstances, toutes sortes de facteurs mentaux qui, bien que leur nature phénoménale soit voilée par l'ignorance, certains se trouveront vertueux à la lucidité et d'autres au contraire rajouteront à l'obscurité mentale.

Ainsi, les différents facteurs mentaux qui constituent l'agrégat samskara font office de "vecteurs" de devenir qui vont prendre le cap de l'obscurité mentale et ou de la lucidité selon notre façon d'infléchir sur la causalité psychique, notre karma. En vertu de la causalité de l'activité mentale que l'on nomme "karma", notre avenir existentiel n'est pas fatal mais bien de notre ressort et de notre responsabilité.

Alors que l'ignorance est le simple fait de ne pas connaître les phénomènes et l'esprit pour ce qu'ils sont, le voile de la discrimination qui s'ensuit fait que les phénomènes et l'esprit se présentent selon nos élaborations imaginaires (sct. pra-pañca, tib. treupa).

Tout ce qui s'élève alors à l'esprit est appréhendé comme altérité dont nous serions destinataires renforçant ainsi un sentiment d'identité au moi occasionnant l'idée de "mon esprit". Par la saisie d'altérité en ces formations mentales (karma), une trace est faite qui induit une tendance latente en devenir.

3) Agrégat conscience (vijnana)
Sans les voiles de l'ignorance et de la discrimination binaire, nous aurions pu jouir en toute intelligence des six consciences "sensorielles" (sct. vijnana, tib. nam-shé) qui ont pour seule aptitude de nous faire savoir les aspects (sct. vijnaptimatra, tib. nam-par rik tsam-nyi) que prennent les apparences phénoménales selon les causes et circonstances.
Mais voilà, condtionnées par ces deux "voiles à la science" (sct. jnanavarana, tib. shé drib), les six consciences (sct. vijnana, tib. nam-shé) transportent avec elles les tendances latentes précédemment inoculées dans les facteurs mentaux et qui vont s'engranger sur un mode subliminal en attendant qu'un stimulus fasse passer une tendance du mode latent au mode patent. Ce fonctionnement à donner le concept d'alaya-vijnana que l'on traduit par conscience-base-toute qui, surchargée d'élaborations imaginaires, se retrouve tel un Janus karmique entre l'imprégnation passée qui deviendra cause ("conscience causale, sct.hetukala-vijnana) et la prégnation d'un futur effet ("conscience résultante").

Du fait de l'ignorance et de ses illusions concomitantes, les six consciences vont servir à colporter en quelque sorte des "fakes news" qui vont se glisser en arrière fond (sct. alaya) où se trament toutes nos élaborations imaginaires (sct. prapanca) pour se diffuser dans l'ensemble du processus karmique des cinq agrégats (sct. panca-skandha) qui vont suivre.

Je précise ici qu'il n'est pas correct de traduire "vijnana" par "conscience dualiste" comme on peut très souvent le lire. Les six vijnanas sont irréprochables. Le mode "dualiste" ou plus exactement "binaire" n'est pas le fait des six consciences mais le fait de l'ignorance et de la soif discriminative qui, à l'instant où est appréhendé l'aspect (tib. nam), impulsent une saisie lui imputant (sct. vikalpa, tib. nam-tok) une altérité satisfaisant ainsi le moi d'une identité vraisemblable.

4) Nom et forme (nama rupa)
"Nom et forme" est une façon de désigner les cinq agrégats. La "forme" désigne la manifestation phénoménale constituée de cinq éléments (sct. bhuta, tib. djoung-po) et le "nom" désigne les rapports intellectifs avec le phénomène (sensation, perception, samskara, conscience)
.

Les cinq agrégats sont cinq processus cognitifs qui s'articulent les uns aux autres dans un système cohérent et conséquentiel que le Bouddha Shakyamouni nomma "karma" pour s'opposer à une conception du karma comme une rétribution de faits et d'évènements. La conception bouddhique du karma implique l'idée d'un libre arbitre parce que la façon d'expérimenter et de percevoir un fait ou un évènement puis d'y réagir ne dépend que de nous.

Le "karma" des cinq agrégats fait toute la singularité des individus, que ce soit le karma d'un esprit voilé par l'ignorance, la soif et la saisie ou celui d'un esprit en voie de "dévoilement"ou celui d'un esprit délivré parfaitement de tous les voiles.

À l'échelle du continuum cognitif des douze facteurs mentaux, ce quatrième facteur mental représente un instant d'individuation actée, un brin d'ADN karmique, un instant d'un "photomaton" en quelque "bardo" ou quelqu'existence que ce soit. Sous l'influence de l'ignorance, les cinq agrégats vont être l'objet de la saisie imputative impulsée par la soif d'existence. Dans ce contexte, on parle de cinq agrégats souillés (tib. zak tché kyi poungpo nga).

À l'échelle d'une existence humaine, c'est le moment marquant de notre individualité qui fait suite à l'instant conceptif (cf. 11. Naissance) dans la matrice quand la conscience "se fixe" aux deux gamètes.

5) Six domaines d'extensions sensorielles
Les six domaines d’extension se composent de six objets sensoriels, des six organes (tib. ouang tèn) servant de base (tèn) aux six facultés sensorielles (tib. ouang). C’est le mode phénoménal selon lequel l’esprit fait des expériences en quelque "bardo" et quelqu'existence que ce soit.

L'alaya-vijnana contient tous les connaissables (sct. jneyata) qui, sous l'intervention "des cinq agrégats" prennent "formes" intelligibles, c'est-à-dire objets/phénomènes qui se prêtent aux compétences des six organes "d'un corps" correspondant au bardo ou à l'existence de l'instant et aux six facultés sensorielles correspondant à l'état mental de l'instant.

À l'échelle d'une existence humaine, le commentaire considère les six domaines d’extension qui s'ouvre au nouveau né à l'instant effectif de la naissance, l'accouchement.

6) Contact
Les six domaines d'extension sensorielles se présente comme un champs infini de connaissables offrant en le continuum expérimentiel l'opportunité de contacts. Le facteur mental "contact" désigne le moment où, par la conjonction de l'objet, de l'organe et de la faculté d'un même sens, le connaissable (sct. jneyata) se rend intelligible à l’esprit en lui donnant Forme (sct. rupa) c'est à dire de nature phénomènale (sct. dharma), une apparence mentale (tib. nang) de nature imagée, relative et manifeste dans un aspect (tib. nam) spécifique.

Précisons que le contact, avec la sensation, la perception, l'intentionalité et l'activité mentale, fait partie des "cinq facteurs omni fonctionnels".

Si le contact est libre d'illusion, la saisie imputative (sct. vikalpa) n'a plus de prise. La cessation d'imputation (sct. nir-vikalpa) révèle la nature phénoménale/épiphanique de la Forme qui renvoie au premier postulat du Sahaja qui est : apparence et vide co-émergent.

Le contact est le facteur mental charnière à l'expérience où l'arbitrage d'un esprit plus ou moins libéré se trouve enclin pour une cause vertueuse ou non conduisant à un effet vertueux ou non. Par vertueux, il faut entendre "propice à la lucidité" et par conséquent "au bonheur". Le contact est à chaque instant cognitif, le facteur déterminant pour notre devenir. Cependant, sous l'effet des voiles de l'ignorance, notre conscience manque de clarté et ainsi d'efficacité au bonheur. La compréhension de ce facteur mental montre toute  l'importance dans la méditation unifiant samtèn (sct. dhyana) et shérab (sct. prajna).

7) Sensation
Le contact met au jour la Forme qui s'avère informative à l'expérience/sensation (sct. vedana, tib. tsor oua) dont le processus cognitif s'exprime au fait d'agréer ou désagréer à la Forme qui se présente. Il faut préciser qu'il n'y a pas de sensation neutre mais il peut y avoir une neutralisation, une inertie (tib. mi yo oua) de l'agrégat sensation dont la satisfaction qu'elle procure entraîne une propension à renaître dans la sphère d'expériences des dieux exemptés de Forme.

Sous l'influence du voile de l'ignorance, l'agréagt sensation valide les imputations faites à la Forme de sorte que, plutôt que de s'en tenir d'agréer ou désagréer, l'impression sera d'avoir quelque chose d'agréable ou de désagréable.

8) Soif
Si l'ensemble du processus cognitif et conceptif, qui va du facteur 2 à 7, se trouve conditionné par l'illusion que suscite le voile de l'ignorance, la soif[1] établit un rapport discriminatif en chaque instant de conscience aspective (vijnana). Par ignorance de la nature co-émergente du couple phénomène/esprit? la soif est un facteur réflexe face à l'appréhension de la vacuité de nos illusions. Inconsciemment, on acquiesce à la soif qui va prendre en "otage" tous les objets d'expérience des six domaines sensorielles dans l'espoir de valider leur altérité et de fait une identité intrinsèque au moi. C'est une tentative par défaut de discernement. La soif fonctionne sur des critères discriminatifs. Nirvana est la cessation de la soif.

9) Saisie
La saisie est induite par le facteur mental "soif" qui, conditionné par l’ignorance, appréhende l’absence de réalité comme annihilation[2] et anéantissement[3].

La saisie est en quelque sorte la main de la soif qui va écarter toute relativité à l'aspect (tib. nam) pour lui imputer (tib. tok) une altérité intrinsèque. Sur la base d'une soif discriminative, la saisie est imputative (sct. vikalpa, tib. nam tok). En recherche de satisfaction, la saisie imputative puise dans les élaborations imaginaires dont s'est imprégnée la conscience causale faisant passer de karma introductif à karma propulseur. Les conditions sont arrivées à maturité pour que "je" devienne un instant de plus sans rien changer à nos identifications.

Cesser toute imputation (sct. nirvikalpa) et réaliser la non-saisie laisse place à l'évidence de se savoir savoir (sct. svasamvitti, tib. rang rik) sans qu'il y ait lieu d'être assujetti à la soif et la saisie. C'est le sens de l'ipséité (sct. svayam eva, tib. rang nyi).

10) Devenir
Le devenir désigne le processus qui fait transiter d'une phase à une autre. En vertu de la nature transitoire de toute manifestation matérielle, biologique et psychique, tout est en devenir incréé et incessant. Le concept de devenir affirme donc l'absence d'état : état de samsara, état de nirvana, état de bouddha. Devenir est souvent considéré comme synonyme de "samsara" mais il s'applique à tout individu dont l'esprit est voilé par l'ignorance, la soif et la saisie ou celui dont l'esprit est en voie de "dévoilement"ou celui dont l'esprit est délivré parfaitement de tous les voiles. En résumé, un arhat, un bodhisattva ou un bouddha ont tous un avenir devant eux.

La différence entre samsara, nirvana et bouddha c'est le mode sous lequel opère les cinq agrégats. Samsara désigne un mode opérationnel des cinq agrégats conditionné par les trois facteurs perturbateurs : ignorance, soif et saisie qui ne poduisent que mal-être du fait qu'ils sont adventices à la loi naturelle de l'esprit. En s'émancipant de ces trois facteurs perturbateurs, leur vacance laisse place au déploiement de la loi naturelle de l'esprit que l'on désigne par "trikaya" :  relativité, phénoménal et loisible.

La nature transitoire et donc causale du devenir implique qu'il ne dépend que de soi pour continuer une existence conditionnée ou parvenir à une existence avec tout un champ de possibilités.

11) Naissance
Il faut rappeler ici que l'on parle de facteur mental et non pas de la naissance au sens biologique.
Le passage par la matrice et l'incarnation ne contamine pas l'esprit et les cinq agrégats.  L'ignorance, la soif et la saisie ne sont pas génétiquement ou sexuellement transmissibles. La matrice conçoit la vie biologique mais ne macule pas l'esprit de l'individu à naître. Certains envisagent l'éveil comme l'espoir pour mettre fin à toute naissance biologique. L'éveil met fin aux illusions perturbatrices qui pourraient s'élever au moment de la naissance mais également au moment de quitter son corps physique. À préciser que le terme "existence" ne désignent pas la vie ou le fait d'être en vie. Par existence on entend un mode de vie avec illusion ou sans. Ce n'est pas la vie biologique en soi qui est considérée comme samsara mais le fait que les cinq processus cognitifs soient conditionnés par l'ignorance, la soif et la saisie.

« Un corps d’émanation reprend naissance
à peu près à la manière d’une hallucination visuelle.
En pensant comme cela, on reste en équanimité.
Par cette méditation en équanimité, on maîtrise la matrice » (Naropa).

À l'échelle du continuum cognitif des douze facteurs mentaux, le facteur mental "naissance" se décompose en deux instants : l'instant conceptif et l'instant effectif. Le premier instant valide la transition d'un bardo à l'autre, et le second acte le déploiement en le nouveau bardo. Le facteur mental "naissance" souillé par la saisie erronée d'un penseur indépendant donne l'illusion de temporalité. Coupant le lien au "devenir" et les délimitations des bardos, non-naissance et non-mort participent de la nature transitoire et relative où rien ne peut se manifester en dehors de l'esprit.

À l'échelle d'une existence humaine s'opère également les deux instants : conceptif et effectif. Le premier instant valide la transition d'un monde à l'autre, et le second acte le développement en ce nouveau monde.

La première partie du facteur mental "naissance" que l'on nomme "instant conceptif" fait référence à l'identification "je nais" qui entérine toutes les élaborations imaginaires venues à maturité depuis la conscience résultante. C'est une sorte de bagage karmique qui vient dêtre fait avant de passer à l'intant effectif de la naissance. Pour un tantrika averti, l'instant conceptif de la naissance est le moment d'exécuter la première partie de la phase de génération (tib. kyé rim) jusqu'à la lettre germe du Yidam qui correspond à la niddation (c'est ici un avis personnel). Cela va permettre d'empêcher les voiles du karma souillé de s'immiscer à cet instant. La seconde partie de la phase de génération va permettre de laisser le processus des cinq agrégats se déployer naturellement comme le ferait un logiciel qui vient dêtre délivré d'un virus. C'est fluide, efficace et cohérent.

À l'instant effectif de la naissance, la phase de génération tantrique reste pertinente, mais peronnellement j'ai un faible pour le yoga de Gyu Lus (sct. mahakaya).

La durée entre l'instant conceptif et l'instant effectif correspond au temps nécessaire à l'intégration des soufles (sct. vayu, tib. loung) et à la configuration de leurs trajets (sct. nadi, tib. tsa) durant le processus physiologique de la gestation qui, dans les conditions optimales, correspond à neuf mois.

12) Vieillesse et mort
Comme pour la naissance, il faut rappeler ici que l'on parle de facteur mental et non pas
de la vieillesse et de la mort au sens biologique. Par identification du "je" au corps physique nous nous en attribuons l'âge de sorte que le facteur mental "vieillesse" s'énonce "je suis vieux". Cette même identification au corps physique qui, par sa nature, ne peut qu'être biodégradable, le facteur mental "mort" au dernier souffle s'énoncera "je meurs", emportant avec soi tout son cortège de phantasmes.

Le moment de la mort biologique est une invitation à délaisser une fois pour toutes nos identifications erronées. Si nous ne le faisons pas sciemment, la résorption de nos souffles entraînera des sentiments d'annihilation et d'anéantissement. Pour éviter les distorsions émotionnelles (sct. klésha) comme la répulsion/aversion, l'orgueil/autosuffisance etc., il est indispensable de se rappeler notre pratique et si possible de nos expériences pour générer une attitude appropriée à l'instant et enfin laisser place à la lucidité/vide du dharmakaya de l'esprit.

« Philosopher c'est apprendre à mourir » (Montaigne)

Et contempler c'est voir la non-mort....

Méditation
Comme le veut la tradition, on médite ces douze facteurs en commençant par l'ignorance et finir par la mort. Ensuite on médite dans l'autre sens pour déterminer les conditions qui produisent le vieillissement et la mort et ainsi de suite jusqu'à s'interroger sur ce qui produit l'ignorance elle-même. Cette reconstitution se fait sans distraction, l'esprit concentré sur le lien causal d'un facteur mental à l'autre.
Lors de la transmission à Kagyu Ling de son Yoga de l'Intériorité, Kalou Rinpotché nous dit : "cette ignorance étant vacuité, sans naissance, sans cessation ni demeure, on demeure en l'état naturel de l'esprit.

 

Notes

[1] On parle généralement de trois soifs, mais il s’agit plutôt d’une seule soif qui opère sur trois domaines. 1. Le domaine sensoriel où la soif tente de valider l’objet des sens comme réel alors que c’est un phénomène mental ; 2. Le domaine du devenir existentiel où la soif tente de valider une identité intrinsèque au moi alors qu'il est de nature phénoménale co-émergent à l’esprit ; 3. Le domaine le plus sombre et le plus énigmatique où la soif tente l’extinction de la conscience elle-même envisageant le néant comme l’ultime salut contre le mal-être existentiel. 

[2] Réduire à l’inexistence toute manifestation, ce qui du fait même de la nature transitoire de toute manifestation est impossible.

[3] Réduire à l’inexistence tout devenir psychique, ce qui du fait même de la nature non née de la conscience est impossible.