On trouvera de plus amples développements sur la façon juste d'écouter un enseignement dans le chapitre premier du Chemin de la Grande Perfection (kun zang lha med chel lung) de Patrul Rinpotché (1808-1887).
Patrul Rinpotché y explique les attitudes qu'il convient d'abandonner et celles qui sont à développer lorsqu'on écoute un enseignement. Nous retiendrons ici pour illustrer notre exemple, qu'il faut d'une part, être un réceptacle exempt de défaut, d'être dénué de six impuretés et d'éviter les cinq façons de ne pas retenir l'enseignement et d'autre part qu'il est conseillé d'adopter les quatre conceptions intérieures et d'avoir les six paramitas présentes l'esprit.
Une personne qui écoute un enseignement, est ici comparée à un récipient dans lequel le guide spirituel verse le nectar de l'enseignement..
Si l'on veut que ce processus porte ses fruits, il faut avoir une écoute libre de distraction. Sinon, nous ne recevons pas l'enseignement, étant alors comme un bol retourné qu'il serait vain d'essayer de remplir.
Bien que l'on écoute les enseignements, il est aussi possible que l'on ne les retiennent pas. Si les instructions entendues ne sont ni assimilées, ni mémorisées, on est alors comme un récipient percé ne pouvant rien retenir et il en résultera l'incapacité à les mettre en pratique.
Il se peut enfin que, lors de l'écoute de l'enseignement, l'esprit soit sous l'emprise de diverses perturbations émotionnelles : orgueil, jalousie, vues erronées, préconceptions négatives vis à vis de l'enseignement ou l'enseignant. Bien que les instructions soient entendues et retenues, les émotions altèrent notre faculté de compréhension et le sens de ce qui est dit étant déformé, nous échappe. On est alors comme un bol où même un nectar, en présence de poison, deviendra nocif.
Il faut donc veiller à être exempt de ces trois défauts en écoutant sans distraction les enseignements, en les retenant et en s'appliquant à en comprendre le sens dans la mesure de nos possibilités, sans le déformer par des interprétations personnelles. Après quoi, il est bien de se remémorer encore et encore les instructions et, enfin de les mettre en pratique.
Ces six impuretés sont :
- L'orgueil qui consiste à se croire supérieur à l'enseignant, à ne pas voir ses propres défauts et à méconnaître les qualités d'autrui et dont le remède est une attitude humble.
- Le manque de confiance qui nous ferme la porte des enseignements.
- Une aspiration inférieure. La base du développement de toutes les qualités étant l'aspiration selon qu'elle sera inférieure, moyenne ou supérieure, nous serons un pratiquant inférieur, moyen ou supérieur.
- La distraction qui vient des objets extérieurs qui captivent notre esprit. Elle nous rend inapte à suivre l'enseignement.
- Être renfermé dans une attitude crispée et tendue en laquelle on demeure replié sur soi, imperméable à ce qui est dit ou l'oubliant dans l'instant.
- Une attitude de dépit ou de déprime. Pour s'en défaire, on développe la joie en pensant à l'opportunité que nous avons, étant dotés de la précieuse existence humaine et ayant rencontré un lama, de pouvoir entendre des enseignements profonds.
- Retenir les mots mais pas le sens.
- Retenir le sens mais pas les mots.
- Retenir ce qui n'a pas été signifié. C'est à dire, se détourner du véritable Dharma en se trompant dans les mots et le sens, retenant quelque chose qui n'existe ni dans l'esprit du Bouddha ni dans ses paroles dans leur double signification définitive et conventionnelle.
- Retenir sens dessus-dessous c'est-à-dire en faisant passer avant ce qui devrait venir après, en intervertissant, par exemple, les prémices et la conclusion. C'est retenir sans respecter l'ordre dans lequel les choses ont été énoncées.
- Comprendre de travers, ce qui a pour effet de gâcher notre pratique.
Se considérer soi-même comme un malade, considérer le Dharma comme un remède, l'ami spirituel comme un médecin et la pratique assidue comme cure. Se faisant, il faut éviter l'erreur qui consiste à:
considérer le Dharma comme du musc convoité
considérer le lama comme le daim musqué
se considérer soi-même comme un chasseur
et considérer la pratique assidue comme un moyen de tuer le daim.
Au contraire, il est nécessaire de développer le respect envers le lama, de prendre conscience de sa bonté et de ne jamais l'oublier.
Quand on désire recevoir un enseignement, on pratique :
- Le don en faisant asseoir le lama sur un siège approprié à la situation et en lui présentant des offrandes : mandala, fleurs etc...
- L'éthique en nettoyant parfaitement l'endroit et en gardant une attitude respectueuse.
- La patience en supportant le chaud, le froid ou toute autre difficulté et, s'il advenait qu'un insecte nous dérange, on ne le tue pas.
- La diligence en se défaisant de toute conception erronée concernant le lama et l'enseignement et en écoutant avec joie dans une totale confiance.
- La concentration en faisant en sorte que notre esprit ne se laisse pas distraire de l'écoute des instructions par quoi que ce soit d'autre.
- L'intelligence (prajna) en éliminant de notre esprit toute conception erronée consistant en des impuretés telles que le doute, l'appréhension etc...
Voir également : Écoute, réflexion et méditation de Lama Shérab