Prisons
J’ai vu des prisons de l’âme plus éternelles que la perpétuité
Alors que même les univers se renouvellent vie après vie sous la magie des Éléments.
Devrais-je m’exténuer par tous les charniers pour recouvrer la charité de ma chair ?
J’ai connu des cœurs haves d’avoir été jugés être sans humanité
Alors que même les arbres morts trouvent une seconde vie sous la main des hommes.
Devrais-je faire brèche dans l’innérrance* absolue pour y voir jaillir la sève d’un espoir ?
J’ai croisé des corps brisés déambuler sans toucher le moindre regard
Alors que même nos murs les plus sinistres se voient épinglés de visages.
Devrais-je assumer toutes les blessures des mondes pour pouvoir être guéri ?
J’ai entendu des voix prendre l’oubli des murs sans âge pour confidence
Alors que même les vents célestes caressent nos plus infimes retranchements.
Devrais-je effriter tous les échos de nos prières futiles pour entendre là où se tait l’intime présence ?
J’ai visité d’improbables réclusions, celles qu’on s’inflige à soi-même
Alors que même les monstres s’accordent le répit du sommeil et des rêves.
Devrais-je m’abîmer dans l’insondable mystère pour accéder au vide numineux ?
Lama Shérab, décembre 2019
* Innérrance : faire usage de son errance pour aller jusqu'au cœur de sa nature innée. Cf. Méharée 2008)
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