Dans le Sutra des Questions (du Roi des Naga) Qui Ne Se
Réchauffe Jamais, le Bouddha déclara :
Ce qui s’élève de conditions ne
s’élève pas ;
Cela n’a pas la nature de l’apparition ;
Tout ce qui dépend de conditions est expliqué
comme vide,
Et c’est en connaissant la vacuité que l’on est
vigilant.
Commençons par examiner cette stance
énoncée par le Bouddha. Qu’elle soit du samsara ou du
nirvana, toute chose qui vient à l’existence ne peut le faire
qu’en dépendance de ses causes et conditions
spécifiques. Il n’y a rien qui puisse apparaître ;
aucun événement d’apparition ne pourrait avoir lieu
sans la présence de ces causes et conditions qui le
produisent. C’est valable aussi bien pour l’apparition de tous les
phénomènes impurs du samsara que pour l’apparition de
tous les phénomènes purs du nirvana. Quelle que soit
l’apparition, elle ne peut avoir lieu qu’en dépendance d’un
regroupement spécifique de causes et de conditions. Sinon cela
ne peut avoir lieu.
Qui plus est, tout ce qui s’élève en
dépendance de causes et de conditions ne s’élève
pas véritablement. Une façon de comprendre cela est de
voir qu’une seule et unique cause ou une seule et unique condition ne
peuvent amener quelque chose à l’existence, mais plutôt
que de nombreuses causes et conditions doivent se réunir pour
qu’un résultat donné puisse apparaître.
Ainsi, si nous examinons n’importe quel résultat et voyons
tout d’abord qu’il faut qu’un certain nombre de causes et conditions
se réunissent pour pouvoir le produire, nous pouvons ensuite
examiner celles-ci et voir que chacune d’entre elles a
également besoin d’un nombre incroyable de causes et
conditions pour pouvoir être produite. On peut remonter le fil
de plus en plus loin et arriver même aux causes et conditions
les plus subtiles. On trouve alors que celles-ci, non plus,
n’existent pas indépendamment mais plutôt qu’elles ne
peuvent exister qu’en dépendance d’une multitude de leurs
propres causes et conditions. Alors nous réalisons que rien
n’existe indépendamment et avec une nature qui lui soit
propre, qu’il n’y a rien de véritablement là. Tout est
comme un rêve et une illusion.
La même chose est vraie pour toutes les pensées qui
s’élèvent dans notre esprit, que ces pensées
soient bonnes, mauvaises ou neutres. Il n’y a pas une seule
pensée qui puisse s’élever d’elle-même, qui
puisse décider de venir à l’existence et puis
naître. Les pensées ne peuvent apparaître que
quand de nombreuses causes et conditions se réunissent pour
les produire. Puisque ces causes et conditions n’existent qu’en
dépendance de leurs propres causes et conditions, et que ces
causes et conditions-là ont, à leur tour, besoin de
leurs propres causes et conditions pour pouvoir apparaître, et
ainsi de suite, toutes sont vides d’existence propre. L’apparition de
pensées est donc vide de toute nature propre.
Dans le Sutra de la Grande Mère, le Bouddha
enseigna :
Le désir étant parfaitement pur, les
formes sont parfaitement pures.
Le Bouddha a expliqué la parfaite pureté en grands
détails. La raison pour laquelle le désir est
parfaitement pur c’est parce que le désir et celui qui
l’expérimente n’existent pas réellement ; ils ne
sont pas réels. Il n’y a par conséquent pas de
défaut à avoir du désir ; il n’y a pas de
défaut dans le désir lui-même parce qu’il n’a pas
de nature propre. C’est pourquoi l’on dit que sa nature est
parfaitement pure.
Le désir lui-même est parfaitement pur et donc celui
qui désire — celui qui a le désir — est parfaitement
pur, et l’objet du désir est lui aussi parfaitement pur. En
somme, c’est comme ça que ça marche.
Si l’essence du désir était en fait impure, alors
celui qui désire serait impur et l’objet du désir
serait impur aussi. Toutefois, puisque la nature essentielle du
désir dans un rêve est parfaitement pure, puisqu’il est
libre de toute souillure, la nature de celui qui ressent ce
désir est parfaite pureté sans tache et la nature de
l’objet du désir est parfaite pureté libre de
souillure. Dans le Sutra de la Grande Mère il y a un chapitre
intitulé La Parfaite Pureté, comprenant plusieurs
volumes et, dans un passage de ce chapitre, le Bouddha
déclare :
Le désir étant parfaitement pur, les
formes sont parfaitement pures ;
Les formes étant parfaitement pures, la perfection de
générosité est parfaitement pure ;
La perfection de générosité étant
parfaitement pure, l’omniscience du Bouddha est parfaitement
pure.
Ce serait très bien si vous pouviez lire le chapitre
intitulé La Parfaite Pureté parce qu’il est facile
à comprendre et plaît beaucoup à ceux qui le
lisent.
La raison pour laquelle Nagarjuna composa ce chapitre analysant
le désir et celui qui désire est que, même
après qu’il eut présenté les analyses des champs
sensoriels, des agrégats et des éléments,
démontrant qu’aucun de ceux-ci n’existent réellement,
ceux qui affirmaient l’existence réelle des choses
prétendaient que ces choses existent, en fait, parce que les
perturbations mentales qui apparaissent en dépendance d’elles
existent. Par exemple le désir existe et cela prouve que les
objets sur lesquels le désir se focalise existent
également parce que le désir ne pourrait pas exister en
leur absence. Puisque la raison qu’ils avançaient pour tenter
de prouver que les choses existent est que le désir existe, il
fut donc nécessaire pour Nagarjuna d’analyser et de
réfuter l’existence réelle du désir et de celui
qui désire.
Le vajray?na explique que les états mentaux afflictifs —
les cinq poisons que sont la colère, le désir, la
stupidité, l’orgueil et la jalousie — sont tous parfaitement
purs, et donc ce chapitre qui analyse ce point en question est
très important pour la pratique du vajrayana. L’analyse dans
ce chapitre est applicable à toutes les perturbations
mentales. Elle commence par le désir, mais peut ensuite
être appliquée à la colère, à
l’orgueil, à la jalousie et à la stupidité. La
raison pour laquelle toute l’attention est portée
explicitement sur le désir est que nous sommes tous des
habitants du monde du désir, et tous les êtres vivants
du monde du désir, depuis le plus petit des insectes jusqu’aux
dieux et déesses les plus puissants, ont beaucoup de
désir. Cela explique pourquoi il est important pour nous
d’analyser le désir et de déterminer que sa nature est
en fait parfaitement pure.
Guèndune Tcheupel a composé le verset
suivant :
Les fourmis, aveugles, courent après le
bonheur,
Les vers de terre, culs-de-jatte, rampent à la
poursuite du bonheur,
En bref, les êtres trouvent tout naturel de s’escalader
les uns les autres dans leur poursuite du bonheur —
Tous les vivants ne recherchent qu’une chose : le
bonheur.
Le point essentiel est que tous les vivants dans le monde du
désir ont énormément de désir. C’est pour
cela qu’il est essentiel pour nous de déterminer que le
désir est parfaitement pur.